Accueil Musique Album Hanumankind – Monsoon Season Il y a des albums qui se contentent de s’inscrire dans une tendance, et il y a ceux qui créent un climat. Avec Monsoon Season, Hanumankind ne livre pas une simple compilation de morceaux : il orchestre une véritable mousson musicale, une déferlante qui bouleverse autant qu’elle apaise. Ici, la pluie devient métaphore : celle des excès, des émotions accumulées et des renaissances possibles. Hanumankind a toujours été un artiste de l’entre-deux. Son parcours, partagé entre l’Inde et les États-Unis, lui a offert une double culture musicale : d’un côté, l’énergie brute du rap sudiste américain ; de l’autre, une profondeur introspective inspirée par les rythmes et les textures indiennes. Cette fracture devient sa force : Monsoon Season ne cherche pas à lisser ses influences, mais à les faire entrer en collision. Le résultat ? Une œuvre hybride où les basses lourdes croisent des sonorités presque rituelles, et où chaque morceau évoque une facette différente d’un même orage intérieur. Plutôt qu’un album conceptuel classique, Monsoon Season fonctionne comme une série de tempêtes successives. Chaque titre explore une émotion liée à ce cycle naturel : L’accumulation (Reckless, Goons) : l’énergie monte, brute, incontrôlée, comme les nuages annonçant l’orage. L’éclatement (Run It Up, Big Dawgs) : les percussions frappent comme la pluie sur le bitume, et le flow de Hanumankind devient cathartique. L’accalmie (Someone Told Me) : un morceau plus introspectif, presque mélancolique, qui incarne la clarté après la tempête. Ce fil narratif donne au projet une cohérence rarement vue dans une mixtape : on y sent une progression émotionnelle, presque cinématographique. Plutôt que de se contenter de featuring « vitrines », Hanumankind choisit des invités qui prolongent son univers : Denzel Curry apporte une noirceur rageuse sur Reckless ; A$AP Rocky réinvente Big Dawgs dans une version plus cosmopolite ; Maxo Kream ramène la rue texane sur Goons. Ces rencontres créent une mosaïque sonore où chaque voix joue un rôle précis dans l’orage qu’il construit. La force de Monsoon Season ne réside pas seulement dans ses textes ou son énergie, mais dans son sound design : Des percussions proches des battements de cœur, mêlées à des nappes synthétiques humides et vibrantes. Un usage du silence et des respirations qui rappellent les instants suspendus avant que la pluie ne s’abatte. Des références subtiles à la musique carnatique et aux chants traditionnels indiens, intégrées dans des beats trap ou boom-bap modernes. C’est une esthétique qui ose brouiller les frontières, un pied dans l’avant-garde sans jamais perdre l’efficacité du rap pur. Avec Monsoon Season, Hanumankind s’affirme comme un artiste qui refuse la neutralité. Il expose ses contradictions – la colère et la tendresse, la fierté et le doute – et les transforme en carburant créatif. Plus qu’un premier grand projet, c’est une carte de visite émotionnelle : l’annonce d’une identité artistique qui ne se pliera à aucune norme géographique ou stylistique. Parce qu’il est rare qu’un artiste arrive à créer un climat autour de sa musique. Monsoon Season ne se contente pas d’être entendu : il se ressent. Il déclenche chez l’auditeur un orage intérieur, un mélange de nostalgie et d’adrénaline. Ce n’est pas juste une mixtape, c’est une expérience sensorielle qui marque la naissance d’une voix unique sur la scène rap internationale.