sur cet album, il pousse son obsession au stade supérieur et il transforme sa lucidité en stratégie.

ORELSAN – La fuite en avant

La fuite en avant, c’est le plus grand mensonge de l’être humain moderne. On dit “je pars”, “je trace”, “j’avance” — alors qu’en vrai, on est juste en train de protéger nos faiblesses, en espérant qu’elles ne nous rattrapent pas.
Orelsan a toujours été champion de l’auto-déconstruction. Mais sur cet album, il pousse son obsession au stade supérieur : il transforme sa lucidité en stratégie. Ici, Orel cesse d’écrire des observations. Il documente des échappées. Ce disque n’est pas un album de rap. C’est un cahier de mouvements.

Le twist du projet

La fuite en avant, ce n’est pas l’abandon du passé. C’est la continuation du passé — mais version “on fait semblant qu’il n’existe plus”. Orelsan raconte le père, l’homme connu, l’artiste scruté. Mais à travers une mécanique très contemporaine : le burn-out de la performance permanente. Et plus il tente d’avancer… Plus il s’enfonce dans la certitude que rester soi-même est désormais impossible.

L’alchimie secrète

Skread n’apporte pas des prods. Il apporte des milieux. Les instrus ne sont pas des beats — ce sont des pièces où Orelsan rentre, ouvre une fenêtre, déplace un meuble, se pose sur le sol, et raconte pourquoi il n’arrive plus à respirer. C’est peut-être le premier album sur l’anxiété…
qui sonne comme une stratégie de conquête.

Le vrai message du disque

La fuite en avant est une impasse. Mais c’est dans l’impasse qu’on trouve les vraies issues. Orelsan ne cherche plus à convaincre qu’il a raison. Il essaye juste de comprendre pourquoi on ne peut plus rester au même endroit quand on a trop vécu. Et c’est là que l’album devient universaliste : il parle à tous ceux qui, à 30, 35, 40 ans, ont compris que l’âge adulte n’est pas un statut, mais une désillusion maîtrisée.

Orelsan signe ici son album le plus honnête : le disque d’un homme qui ne sait pas s’il monte, s’il stagne, ou s’il s’enfuit…
mais qui avance quand même. Parce que dans cette époque où pause = effacement,
la fuite est devenue le seul moyen d’exister.